Un petit voyage improvisé
Hésitants entre Madagascar, Cuba, l'Ouzbékistan et l'Italie, notre choix s'est finalement porté sur la destination qui demande le moins d'organisation, peut-être le moins d'implication aussi, mais nous laisserons là les débats philosophiques. Ce sera donc l'Italie.
L'Italie, c'est très vaste... On pense naturellement à Rome, Florence, Venise, mais, mais, mais... Et puis, Christelle est allée chercher une lettre à la poste qui a la bonne idée de diffuser des infos voyage pendant les longues files d'attente et depuis Christelle pense Piran en Slovénie. Xavier extrapole à Croatie. Pourquoi pas ? On verra...
Les conditions idéales d'un beau voyage de près de 5000 kilomètres sont réunies : stress professionnel accumulé, petits problèmes de santé, réels ou virtuels mais non moins pénalisants, fatigue, fatigue. Le 24, nous partons donc avec tout notre fardeau direction la famille, puis les amis à Nice et Alasio, station balnéaire à l'Italienne : plages privées, locations de parasol et de cabines qui bouchent la vue de la plage, hôtels et campings chers, eau superbe et beau soleil.
Un peu de riviera avant d'affronter la traversée de la Botte
Gênes
On nous recommande Gênes. Je n'en ai pas un très bon souvenir, d'un courte traversée il y a 10 ans. Ce sera une bonne surprise. Entre le port totaement moderne qui accueille en particulier un superbe et immense acquarium, des points de vue panoramique superbes et les ruelles tortueuses de la vieille ville, Gênes se révèle une ville agréable et je comprends mieux maintenant un moyen de transport en commun mentionné dans les guides et qui m'étonnait : l'ascenseur !
    
Portofino et Cinque Terre

Juste après Gênes et jusqu'à la Spézia, la côte abrite des trésors de petits villages. Plusieurs sont concentrés sur les parcs nationaux de Portofino (que notre guide considère comme le Saint Tropez local - combien de Saint Tropez verrons-nous sur la route !) et Cinque Terre. Après réflexion, on peut dire que ce sont les premiers "parcs à riches" du voyage : accès difficile, parkings saturés, yatchs à foison, la nature et l'eau d'une transparence impressionnante sont largement éclipsées par les excentricités de l'argent et l'assez fausse authenticité des lieux. Mais comment ne pas se prendre à rêver de caboter le long de cette côte ?
La Spézia est un immense port industriel, de plaisance, mais surtout militaire. De là, nous abandonnons la côte pour remonter sur Parme, pour quelques tunnels de plus.
La traversée de la Botte
Parme
A Parme, nous découvrons d'abord les spécificités du voyage dans l'Italie intérieure. D'une part, il n'y a pas de chaînes d'hôtels pas chers, pas de chaînes d'hôtels tout court aux abords des villes. La recherche d'un logement relève donc avant tout du petit bonheur la chance. On ne s'en sortira pas mal d'ailleurs, à ce jeu là. D'autre part, la gestion de la circulation et des parkings a drastiquement évolué en 10 ans : la majorité des centres villes sont désormais piétons et les aires de parking bien réglementées. finies les arnaques au parking qui étaient devenues notre hantise en Toscane. Malgré tout, aller d'un point A à un point B, ou pire, revenir sur le point A peut vite s'avérer une petite galère et une bonne paire pilote - copilote s'avère un gros plus.
Parme, petite ville tranquille de province m'apparait comme un condensé de l'Italie : son nom, évocateur de douceurs gourmandes nous incite à y entrer, son complexe historique magnifiquement préservé étanche une soif de mieux comprendre notre histoire passée, le charme de ses ruelles fraiches et exemptes de trafic motorisé nous convie enfin à la farniente, à la bella vita sous un soleil de plomb.

 
Je reste particulièrement marquée par le souvenir de la beauté sobre du baptistère (l'endroit où les chrétiens recevaient le baptème à l'âge adulte par immersion complète, pour rappeler le baptème du Christ) et, par contraste, de l'intérieur entièrement peint de la cathédrale.
Modène
Le voyage se poursuit toujours sous le signe de l'art, roman et gastronomique. Nous faisons une petite halte devant la douce modène dont les arcades nous protègent du soleil avant de repartir pour Bologne.
Bologne

Bologne, une des premières villes universitaires du moyen-âge, abrite aussi un des plus vieux "gratte-ciel" du monde. 100 mètres de haut, construit en l'an mille. Notre petite tour de 30 étages qui surprend tant nos amis français fait bien pâle figure face à ce spécimen chancelant, construit pour la seule haine de ses voisins ! De là-haut, la vue est spectaculaire sur les toits de tuiles rouges de la ville.

Plus bas, la cité grouille de badeaux locaux et de touristes. Comme d'habitude, pas de voitures, condamnées dans ce dédale de ruelles étroites, de rues à arcades et de galeries marchandes. Sans prendre le temps de déguster les fameuses pâtes à la sauce au ragoût dans leur contrée de naissance, nous terminons cette superbe mais épuisante journée par Ravenne.
Ravenne
Ravenne, ville byzantine proche de la mer adriatique que nous ne verrons pas en ce point, ville oubliée et endormie qui pour cela conserve des trésors du IVeme siècle : cathédrale, mosaiques, baptistère,... Une ville superbe, certainement la meilleure table de notre voyage, et pourtant, certainement une ville de trop dans cette longue journée minée par une cuisse en panne, un corps qui fait mal. L'éclat des mosaiques se perd dans la fatigue, la bonne volonté s'épuise.
La plaine du Pô et la lagune vénitienne
La magie des cartes est ainsi faite que d'une étoile, un cadre jaune, une route sinueuse, on décide de changer un itinéraire. Nous oublions Ferrare pour Comacchio et le bord de mer. 
La chaleur devient poisseuse, la route le long de la plaine du Pô puis de la lagune vénitienne s'étire, plate, infinie. La pêche à l'anguille, principale activité économique en dehors du tourisme, orne les bords des canaux et méandres du delta de lignes interrompues de filet. Les plages s'ornent aussi des petits parasols et des cabines de plage. De ce delta, surgit l'abbaye de Pomposa et son campanile si particulier, presque unique trace de vie humaine à plusieurs kilomètres à la ronde.
Comacchio
Quelques tours et détours qui nous font penser que nous n'avons peut-être pas pris le bon chemin et nous voici soudain devant une petite Venise, une de plus faute d'avoir vu l'original ! Comacchio est une jolie bourgade construite autour des canaux. A 15h, tout le monde y dort et seuls quelques intrépides touristes osent longer les murs à la recherche d'ombre ou se faire prendre en photo sur le magnifique pont à 4 branches.
Nous devrions retourner sur la route principale direction Ferrare mais le guide vert nous annonce que "Comacchio est un petit Chiogga". Un coup d'oeil sur la carte nous montre que le grand Comacchio n'est pas si loin, à l'extrémité opposée de la lagune par rapport à Venise. Allons voir !
Chioggia
 
Ravissement des yeux. Chiogga s'étire sur deux bandes de terre séparées par un canal qui ferment la lagune. Maisons décrépies, gondoles et barquettes, ponts vénitiens, charme vieillot et désuet, je n'ose imaginer Venise... Je n'ose rêver de Venise, si proche, de l'autre côté de la lagune et pourtant si loin.
Vers la Slovénie et la Croatie
Nous nous arrêtons à Padoue pour la nuit. Ce choix conditionné par l'idée qu'il sera plus simple de trouver un toit à Padoue que le long de la lagune touristique s'avère le bon. Nous trouvons facilement un petit hôtel en face même de la cathédrale Saint Antoine. Le centre ville est petit mais les restaurants sont ici rares. Padoue, ville de Giotto, ne semble pas beaucoup plus attirer les foules touristiques que ces consoeurs de l'intérieur des terres.
C'est le lendemain que nous commettons l'erreur majeure du voyage. Le manque de sommeil, la chaleur, difficile de nous trouver des excuses après tout le soin apporter pour l'éviter. Ce samedi 1er août, nous prenons l'autoroute pour Trieste, direction la Slovénie. C'est sans compter que le premier tronçon du chemin, Padoue - Venise, est un des plus embouteillé d'Italie. 2h15 plus tard, nous parvenons enfin à la première sortie d'autoroute pour commencer un long contournement de Venise via Trévise qui nous offre une petite halte bien sympatique. Ravigorés et remis dans le droit chemin après cette erreur de débutants, nous décidons finalement de nous arrêter à Portogruaro pour la nuit où il devrait être plus facile de trouver un toit que dans uneTrieste encore lointaine.
Portogruaro nous offre la surprise d'une jolie bourgade fière de son patrimoine avec des maisons des XIII, XIV, XV et XVieme siècle bien préservées (gothique, renaissance et baroque) mais moderne et parée de centres commerciaux accueillants même le dimanche !
Nous sortons d'Italie après un détour par Trieste, immense port industriel et une succulente pizza sur des bords de mer bien rénovés.
Slovénie
Ljubjana
Je suis curieuse de découvrir la Slovénie, enfin d'en avoir un aperçu autre que les quelques clichés associés d'ex-Yougoslavie, de montagnes,... Et quelle surprise !
Nous commençons par acheter une vignette pour pouvoir utiliser les autoroutes slovènes. C'est nouveau et ça a pour but a priori de fluidifier les accès et sorties d'autoroutes. Un peu cher quand on ne passe que deux jours dans le pays, mais bon...
Nous arrivons rapidement sur les abords de la capitale, Ljubjana. Tellement vite que nous la manquons, la dépassons. Comment remarquer que nous sommes près d'une capitale ? Pas de signe vraiment distinctif si ce n'est l'approche des contreforts montagneux et puis sans carte, comment savoir que Kranj est la ville d'après sur la route et pas la banlieue !
Nous arriverons finalement au centre de la ville pour nous rendre compte qu'il n'y a pas beaucoup d'hôtels, qu'ils sont chers et peu visibles, mais ça, pour le coup, c'est bien le propre d'une capitale. L'office du tourisme de la gare nous sauvera et nous indique une chambre correcte et surtout idéalement placée dans le centre ville au pied du château.
Nous découvrons un pays résolument tourné vers l'Europe, passé à l'Euro, au niveau de vie élevé qui combine à la fois la douceur d'un pays de 2 millions d'habitants et le dynamisme d'une économie résolument tournée vers le high tech et l'international. Une langue mi slave, mi-italienne, des visages à la frontière des types slaves et romains comme le témoignent les représentations des angelots bruns mais rondouillards.
Liubjana est une ville agréable, proche des montagnes, vertes et boisées, dominées par le château. La vieille ville est superbe, très touristique. Les restaurants sont nombreux, les spécialités culinaires moins impressionnantes mais le poisson toujours aussi bon et Xavier continue son perfectionnement en dorade.
  
Piran
Mon objectif initial ou ma tentation première qui nous a incité à découvrir la Slovénie, c'est le petit port de pêche de Piran. Après la halte dans le centre des terres et la capitale, nous revenons donc sur nos pas pour rejoindre l'Adriatique. Nous arrivons relativement tard à Piran pour découvrir que tous les accès de la ville sont bloqués aux voitures. Difficile quand on a du mal à marcher, encore plus difficile de monter les rues en pente pour accéder aux points de vue, certes superbes mais durement conquis pour moi.
  
Voilà, un petit tour et puis sans va. Nous avons décidé de dormir en Croatie et partons à la recherche d'un camping côtier et c'est à Novigrad que nous planterons la tente.
Croatie : l'Istrie
Les routes de l'Istrie ne sont pas celles d'Italie ou de Slovénie. Les autoroutes n'en ont que le nom mais certainement pas la largeur et la qualité. Le centre est montagneux et la côte embouteillée, comme en Italie, quoi !
Le camping est au bord de l'eau, superbe et rafraîchissante après une longue journée de voiture. Il a sa discothèque, sa miss camping, son DJ attitré, on pourrait presque se croire dans le film !
Istrie intérieure
     
L'intérieur de l'Istrie est tout autre : très montagneux, nous visitons une succession de petits villages sur des pitons rocheux : Buje, Pazin,...
Porec la magnifique
L'Istrie est le point de rencontres entre les civilisations grecques et romaines, Byzance et Venise et à ce titre conserve un patrimoine historique riche et varié, largement restauré depuis quelques années. Porec est le symbole des villes d'Istrie, magnifique, agréable à vivre (du moins pour le touriste, qui, s'il est loin d'être le seul, ne se sent pas étouffé non plus).
Pula et les environs
D'autres villages parsèment la côte et méritent une halte : Kvsar, Fazana et permettent des vues sur les centaines d'îles qui longent la côte. La plus célèbre de ces îles (Brijuni)est fameuse pour avoir été la résidence secondaire de Tito et continue à héberger en toute discrétion les people et autre membre de l'intelligentsia. Touristes de la plèble, vous aurez le droit de faire le tour de ce parc à riches à l'eau si translucide et de rêver d'y croiser Madonna, Sarkozy, ou d'autres, il en faut pour tous les goûts.

Pula
Pula est remarquable pour son amphithéâtre. Mes petites jambes renoncent à le visiter, pas trop bien conservé, salle de spectacle en été... La ville me déplaît, peut-être parce que je suis fatiguée, peut-être parce que j'aurais préféré rester plus de temps à Porec, peut-être parce qu'il lui manque ce petit je ne sais quoi qui fait qu'on a envie d'y rester...
C'est néanmoins un bon point de chute en Istrie, tout proche de Porec, des îles Brijuni et du magnifique village de Rovinj.
Rovinj

Nous avons réservé des billets de ferry pour revenir par Zadar - Ancone. Nous traversons donc une dernière fois l'Istrie par Pazin, Otpieka, Rijeka pour rejoindre l'île de Krk (accessible par pont).

Croatie : de Rijeka à Zadar
Krk
 Quand on sait que le "r" à l'intérieur de deux consonnes se prononce "eur", on y arrive mieux. Nous voici donc à "Keurk". Le long de la côte de Dubrovnik à Rijeka, nous sommes dans la Mecque du tourisme balnéaire, majoritairement germanophone (même si on y croise beaucoup de français). Et on comprend le phénomène ! Les plages sont magnifiques, les villages superbes, les paysages fantastiques (avec un vrai coup de coeur pour l'île de Pag malgré la grande déception de son fromage).
On se paye même le luxe d'une petite nuit à la montagne (massif du Vélébit), panorama à vous couper le souffle perdu dans le vent. Ca sera la seule nuit fraîche du voyage entre Krk et Pag, tout ça par hasard, parce qu'on a craqué après deux heures d'attente au bac de Pag. Il faut parfois savoir renoncer pour accéder à de grandes choses...

Zadar
Zadar, notre dernière halte avant de rentrer en Italie. Nous logeons chez l'habitant au centre de la vieille ville, entièrement reconstruite après la guerre. Etrange de se dire que ces ruines romaines ont une dizaine d'année ! J'adore écouter l'orgue de mer le soir, une idée géniale.
Le retour depuis Ancone
Plus d'une semaine plus tard, nous voici de retour en Italie par Ancone. Nous sortons du ferry avec presque une heure de retard et il est déjà près de 19h mais l'appel du large sonne encore et Urbino semble une destination for sympatique et pas si loin, surtout, il faut le dire, lorsque les écarts d'échelle entre nos cartes d'Italie et de Croatie joue un effet loupe. Les Marches et San Marino
La région d'Ancone, appelée les Marches est bel et bien comme le guide l'indique, une succession de vallées dorées. Certes, la lumière de fin de soirée doit y être pour quelquechose, toutefois l'impression est saisissante. La vue d'Urbino, ville médiévale de briques homogènes, perchée sur sa colline vallonnée est magique.
La visite de la ville est beaucoup moins drôle pour ma cuisse flageolante. Je souffre le martyre pour monter la pente raide de la rue qui nous amène à la place de la république. Le lendemain, c'est par ascenseur que j'affronte le début de la visite mais les forces me manquent pour réellement profiter du charme de la ville.
Nous poursuivons notre petit détour par une incongruité européenne, un mystère politique : la petite république de San Marin. Perchée sur un piton rocheux, le petit pays est dominé par sa capitale et ses trois tours. La pression touristique monte ici, on ne sait, si sous l'effet de l'impulsion de la proximité avec Rimini, l'étrangeté politique ou la détaxe et les ventes d'armes.


De retour au pays des autoroutes, nous fonçons vers Milan, la capitale du Nord avec juste le temps d'un pincement de coeur en repassant par Ravenne, Bologne, Modène et Parme. Milan et son Duomo
Milan , la ville infernale pour les automobilistes. Nous adaptons, semble-t-il, la bonne stratégie. Nous repérons un petit hôtel près d'une station de métro. La chambre fera l'affaire. La voiture est bien garée pour la journée. Nous pouvons nous balader tranquillement ou presque.

Le Duomo, cathédrale gothique, mais gothique flamboyant. Malgré les rénovations perpétuelles en cours, la vue de ce monstre en sortie du métro est époustouflante. Plus de 2000 statues, des milliers de pinacles. La balade sur les toits est une courte échappée du quotidien au paradis de l'inutile, de la jubilation des architectes, des tailleurs de pierre, des artistes maçon qui montent, démontent, remontent depuis neuf siècles ce chef d'oeuvre pour personne, pour rien, pour le pur plaisir de la belle oeuvre.
La suite...
Un dernier arrêt au bout de la vallée d'Aoste, juste avant le tunnel du mont Blanc, à Courmayeur et sera le retour au quotidien, à l'inconnu, voyage perpétuel au long court. La pluie nous attend de l'autre côté de la montagne, ma cuisse ne me laisse plus tranquille, tendinite dira le médecin et pourtant j'ose croire en le bénéfice de ces trois semaines de repos, de doutes, de réflexion.
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